Nouveautés dans le traitement de la Maladie de Dupuytren

La maladie de Dupuytren est caractérisée par une rétraction des doigts secondaire à une prolifération de tissu fibreux rétractile dans l’aponévrose palmaire et ses prolongements dans les doigts. Elle est associée dans environ 10% des cas à une fibromatose plantaire (maladie de Ledderhose) et beaucoup plus rarement à une induration des corps caverneux (maladie de Lapeyronie). Elle est plus fréquente dans le nord de l’Europe et affecte plus souvent les hommes que les femmes habituellement après 50 ans.

Le diagnostic est exclusivement clinique. Il est basé sur la présence de brides et d’épaississements nodulaires de l’aponévrose palmaire fixés à la peau (Fig. 1).GERARD;CH;

Les nodules sont responsables de la rétraction, les brides fibreuses ne sont que l’épaississement de l’aponévrose soumise à une tension mécanique constante.

•       Ce qu’on sait
‣        La maladie n’est pas douloureuse et n’est que peu invalidante sauf dans les cas extrêmes
‣        De nombreux cas ont une origine génétique. La plus grande prévalence de la maladie chez lez Européens du nord et leurs descendants dans le monde a permis d’exclure le rôle du climat et a conduit à la notion (mise en doute aujourd’hui) d’une distribution de la maladie par les invasions des Vikings.
‣        Le diabète, l’excès d’alcool et de tabac jouent un rôle favorisant.
‣        Le rôle de l’activité manuelle longtemps présenté comme important est maintenant mis en doute

•       Ce qu’on ne sait pas
‣        L’origine et la prévalence de la maladie, difficile à déterminer car la majorité des cas évolue lentement et ne nécessite jamais de traitement
‣        Les mécanismes impliqués dans son développement
‣        Pourquoi certains patients ont une évolution très rapide alors que d’autres n’évoluent que lentement.

Le traitement classique
L’origine de la maladie et les processus impliqués dans son développement demeurent obscurs. Les choix thérapeutiques restent donc incertains d’autant plus que tous les patients n’évoluent pas de la même façon.
Les corticoïdes, la radiothérapie et les attelles sont inefficaces. La chirurgie permet de corriger le rétraction mais ne guérit pas la maladie et les récidives sont fréquentes (environ 2/3 des cas après 8 ans). Les complications ne sont pas exceptionnelles. Le choix de la meilleure approche chirurgicale est donc parfois difficile.

Les nouveautés
Depuis environ trois ans, un nouveau traitement par injection de collagénase (Xiapex®) est disponible en Belgique. Nous avons été parmi les premiers à l’utiliser dans le cadre d’un essai clinique avant sa commercialisation.

Le produit contient un mélange de deux collagénases différentes qui agissent à des niveaux différents sur les chaines de collagène de type 1 et 3 qui sont présentes dans les tendons, les ligaments, le tissu cicatriciel et la maladie de Dupuytren. Elles n’agissent pas sur les membranes basales et ne risquent donc pas de « dissoudre » les nerfs ou les vaisseaux. Par contre, il faut faire très attention à ne pas injecter le produit dans un tendon qui risquerait alors de se rompre.

L’utilisation du produit est réglementée. Il n’est disponible qu’en pharmacie d’hôpital sur prescription d’un chirurgien orthopédiste ou plasticien qui a suivi une formation spécifique. Le doigt à corriger doit présenter une rétraction de minimum 30°. Au maximum 2 injections par main par période de deux ans sont rembroursées. La prescription doit être accompagnée d’un rapport et de photos.

Malgré ces contraintes administratives, les bénéfices de ce traitement sont considérables. L’injection du produit se fait habituellement sans anesthésie avec une aiguille très fine de seringue à insuline (Fig. 2 et 3).

Fig2Dupuytren    Fig3Dupuytren

Le patient quitte la clinique après une heure, sans pansement. Il peut utiliser la main. Il est revu, après avoir laissé le produit agir pendant 24 à 48 heures. La réextension du doigt se fait, à la consultation, sous anesthésie locale. A ce moment, la région infiltrée est légèrement gonflée et bleutée. Le patient retourne chez lui sans pansement et peut utiliser la main. Le gonflement local disparaît très rapidement.

Une attelle d’extension à porter la nuit pendant 3 à 4 semaines est prescrite.

Dans notre étude prospective portant actuellement sur 170 injections, la correction de la rétraction a été comparable à celle que nous aurions pu obtenir avec la chirurgie classique mais nous n’avons observé aucune lésion nerveuse, aucune infection, aucun signe de dystrophie (SDRC).

Un avantage supplémentaire est que contrairement à la chirurgie il n’y a aucune formation de tissu cicatriciel ce qui devrait faciliter une éventuelle reprise pour récidive.

Conclusion
Les avantages de la technique sont donc évidents:

•          Traitement ambulatoire
•          Pas de pansement, mobilisation et usage immédiat
•          Peu ou pas d’arrêt de travail
•          Aucune complication significative
•          Aucune formation de tissu cicatriciel

Il reste bien sûr à évaluer le risque de récidive, ce que nous avons commencé à faire.

JP. Moermans, MD, PhD
Centre de chirurgie de la Main et du Membre Supérieur
Clinique du Parc Léopold