L’urgence psychiatrique est d’un abord difficile. Chaque situation nécessite une attitude différente et adaptée. C’est ce qu’a détaillé le Dr Rodolphe Van Wijnendaele, psychiatre, lors du symposium organisé au CHIREC – site Ste-Anne-St-Remi en novembre dernier.
Le Dr Rodolphe Van Wijnendaele définit les Red Flags comme «des signes qu’il faut toujours investiguer, et sans lesquels une prise de décision est impossible».
Risque suicidaire: les bonnes questions
Tout patient porteur d’un trouble psychiatrique est potentiellement suicidaire, et cette question doit donc toujours être explorée au service des urgences. Les questions au patient doivent être claires et précises : «avez-vous des idées de suicide?» et pas «avez-vous déjà pensé à la mort?». Il faut éviter les circonlocutions qui n’amènent que des réponses peu interprétables. L’entretien suppose qu’on montre à l’interlocuteur qu’on a le temps de s’occuper le lui, et il est important de bien capter le langage non-verbal. Il est ainsi primordial de regarder le patient quand on pose une question délicate.
S’il y a des idées suicidaires, il faut approfondir: «avez-vous un plan pour mettre vos idées en application?». Une réponse vague n’est pas suffisante. Et s’il y a déjà eu des tentatives de suicide par le passé, c’est la tentative la plus grave qu’il faut investiguer plus avant, car elle est un bon indicateur du risque suicidaire.
Il faut également toujours explorer les hallucinations, surtout celles liées au suicide, car leur présence est une facteur de risque fort préoccupant, surtout si le patient ne réussit pas à prendre du recul par rapport à ces «voix» et a tendance à leur obéir.
Le patient agité: ne pas forcer
Il faut respecter des mesures de prudence personnelle face à des patients agités: ne pas y aller seul, veiller à pouvoir toujours partir, vérifier la présence d’objets contondants.
Il vaut mieux faire appel à la police en cas de besoin que jouer les héros. L’hôpital reste avant toutes choses un lieu d’accueil et de soin, et non une instance de protection de l’ordre public.
Un délire agité doit être pris très au sérieux. On envisagera d’abord les causes organiques possibles. S’il y a une consommation de médicaments, de drogue ou d’alcool, on choisira avec soin le sédatif éventuel à prescrire. Par exemple, si le patient consomme des benzodiazépines, en ajouter risque d’aggraver la situation. On optera alors plutôt pour un neuroleptique.
Des questions simples peuvent ouvrir des pistes pour le diagnostic. Demander la date et le lieu où on est, permet de suspecter une confusion. Le lieu et la cause d’une hospitalisation antérieure peuvent donner des informations intéressantes sur le parcours du patient.
Chez le schizophrène, des symptômes positifs récents sont inquiétants. La résistance à un traitement en cours, une conscience morbide réduite, la prise d’alcool ou de drogues, les antécédents de passage à l’acte agressif sont des facteurs de risque de passages à l’acte auto ou hétéroagressifs.
Attention au syndrome sérotoninergique, au syndrome neuroleptique malin et à la prise de lithium (toujours doser le lithium chez un patient qui en prend, vu les lourdes et multiples conséquences de surdosages éventuels). Il ne faut pas négliger l’examen somatique.
Addictions : une dimension sociale
La consommation de substances psycho-dysleptiques telles que l’alcool ou la cocaïne augmente le risque de passage à l’acte auto ou hétéroagressif et doit donc toujours être évaluée.
Il ne faut également pas oublier que les sevrages d’alcool sont potentiellement fort dangereux. Il ne faut donc pas laisser repartir celui qui présente un delirium ou des manifestations intenses de son syndrome de sevrage.
L’exploration recherchera des symptômes psychotiques et les problèmes organiques consécutifs à l’addiction. Des difficultés d’ordre social sont à la fois facteurs de risque et conséquences de la consommation de drogues. Attention aux comorbidités psychiatriques : dépression, trouble bipolaire et schizophrénies sont à rechercher.
Dans la prise en charge, outre le traitement spécifique, il faudra toujours donner des suppléments de vitamine B1 lors de problèmes de dépendance à l’alcool, ou par ailleurs dans tous les cas de dénutrition pour quelque raison que ce soit.
Dr Rodolphe Van Wijnendaele, psychiatre, CHIREC – site Ste-Anne St-Remi
Des consultations en psychiatrie sont disponibles sur l’ensemble des sites du CHIREC, sur rendez-vous.
La Clinique Ste-Anne St-Remi dispose quant à elle d’un service de Psychiatrie proposant un service d’hospitalisation classique et un hôpital de jour.